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In memoriam Jean-Marc CHASSERY

Jean-Marc Chassery nous a quittés brutalement, le 17 juin 2023, foudroyé par une crise cardiaque à la descente de l’avion qui le ramenait avec son épouse Brigitte d’un voyage au Canada.

Jean-Marc, directeur de recherche au CNRS, a marqué plusieurs générations de scientifiques par ses activités variées.

Dans son domaine de recherche, il a promu par ses travaux et ses ouvrages le traitement d’images et plus particulièrement la géométrie discrète et algorithmique. Ainsi, avec Annick Montanvert, il a été l’auteur d’un ouvrage publié dès 1991, puis co-éditeur, avec David Coeurjolly et Annick Montanvert, d’un autre ouvrage en 2007.

Jean-Marc, le chercheur
Jean-Marc a soutenu sa thèse de troisième cycle en 1976, en analyse d’images numériques obtenues par un système automatique de microphotométrie à balayage. Ses travaux l’ont rapidement conduit à se pencher sur la construction d’une géométrie adaptée à la structure discrète des images.
Jean-Marc a de fait été l’un des pionniers d’un domaine de recherche naissant, la géométrie discrète, qu’il n’a ensuite eu de cesse de construire, de soutenir, de structurer.
Dans sa trajectoire scientifique, Jean-Marc avait à cœur d’établir des ponts entre des approches, qui devenaient de fait complémentaires, comme la morphologie mathématique et la géométrie algorithmique pour l’analyse d’images. Au fil de ses résultats, ses travaux ont également été novateurs en codage, en traitement d’images ou de vidéos, et en sécurité multimédia.
Il a été l’un des maîtres d’œuvre de la création d’un groupe de travail (toujours très actif aujourd’hui et rattaché à deux GDR), d’une petite conférence francophone démarrée en 1991 entre Strasbourg et Grenoble, et qui est depuis devenue l’« International Conference on Discrete Geometry for Computer Imagery (DGCI) ». Il est aussi co-auteur d’un premier livre en 1991, puis co-éditeur d’un ouvrage collectif en 2007, ouvrages qui trônent sur les étagères de nombreux enseignants-chercheurs aujourd’hui.
Désireux de former des jeunes chercheurs, il a encadré et guidé de nombreux doctorants, sachant les encourager, leur faire prendre confiance et en ayant grand soin de les intégrer dans leur communauté scientifique.
Jean-Marc avait une personnalité sincère et généreuse. Avec une vision large de la recherche, initiateur d’idées, fédérateur, il a été un guide pour ses doctorants et une référence pour ses collègues. Jean-Marc était connu pour poser beaucoup de questions lors des évènements scientifiques, sa curiosité a inspiré plusieurs générations de chercheurs qui ont travaillé ou travaillent encore à Grenoble ou ailleurs en France et à l’international.
Président du comité de pilotage de la conférence DGCI pendant plusieurs années, ses discours lors des repas de gala de cette conférence, au volume sonore parfois limité, mais pleins d’humour pince-sans-rire et de gentillesse, avaient toujours un franc succès.   

Au niveau national, il a assuré des responsabilités tout au long de sa carrière : directeur du GdR ISIS de 1992 à 2001 après avoir eu des responsabilités dans le GdR TDSI ; membre du Comité National du CNRS (CoNRS) en section 07 en 2001 ; Directeur-Adjoint Scientifique (DAS) à la création de l’INSIS de 2009 à 2012 ; délégué scientifique à l’HCERES de 2012 à 2017.

Jean-Marc, l’entraineur
Sans jamais imposer, l’air de rien, il proposait des pistes dans le sens de fédérer les énergies françaises. À la fin des années 80, donnant beaucoup de lui-même, ses qualités humaines et scientifiques lui ont permis de réussir la conjonction de deux astres jumeaux mais jusque-là séparés : la théorie du signal et le traitement d’images. Jean-Marc savait faire l’unité dans la diversité. Son regard œcuménique a aussi réussi à fédérer recherche universitaire et recherche industrielle, un défi plus complexe en France que chez nos voisins. C’est ainsi qu’il a très durablement établi les fondements du GdR ISIS, une ‘success story’ à la française.

A Grenoble, où il a su, avec la diplomatie et la ténacité qui le caractérisaient, réaliser la fusion de plusieurs laboratoires et équipes autour du traitement du signal et des images. Après l’éclatement du laboratoire Informatique, Mathématiques et Applications de Grenoble (IMAG) en 1982, il a participé à la création de la fédération IMAG et du laboratoire Techniques de l’Informatique, des Mathématiques, de la Microélectronique et de la Microscopie quantitative, puis à la création du laboratoire Techniques de l’Ingénierie Médicale de la Complexité (TIMC). Enfin, il a œuvré à la création du Laboratoire des Images et des Signaux (LIS) qu’il a dirigé de 2001 à 2006, puis à la fusion de trois laboratoires, le LIS, l’Institut de la Communication Parlée (ICP) et le Laboratoire d’Automatique de Grenoble (LAG) qui constituent aujourd’hui le laboratoire GIPSA-lab, qu’il a dirigé de 2007 à 2010.  

Jean-Marc, le directeur
Le premier défi de Jean-Marc a abouti à la création du LIS en 1997. Avec son équipe de géométrie discrète qui était à TIMC, il a été moteur dans la création du laboratoire, en permettant une fusion harmonieuse du traitement du signal et des images, reproduisant au niveau local le travail qu’il avait entrepris avec d’autres au niveau national avec le GdR. Cette réussite a fait du LIS un des laboratoires français les plus visibles en traitement du signal et des images. Au milieu des années 2000, à l’instigation du département STIC du CNRS qui voulait un regroupement massif des nombreux laboratoires STIC à Grenoble, il a pris en main la réflexion pour un regroupement des trois laboratoires LIS, LAG et ICP, ce qui à conduit au laboratoire GIPSA. Nous devons la réussite de ces défis à l’intelligence et aux qualités humaines de Jean-Marc. Sa bienveillance, son écoute, sa vision collective, une discrétion certaine que l’on pouvait retrouver dans sa voix, mais qui cachait une fermeté et une ténacité  et une volonté pour ce qui lui tenait à coeur, ont été les moteurs de cette réussite.
Jean-Marc Chassery, en tant que directeur de GIPSA, a assumé la lourde tâche de regrouper et de fédérer les services administratifs des trois laboratoires. Il a su faire confiance aux personnels administratifs pour proposer une organisation efficace pour atteindre un but commun : la création de GIPSA. Il a su communiquer avec transparence, beaucoup d'empathie et de gentillesse.

Au-delà de son sérieux et de son efficacité, nous retiendrons sa gaieté, son humour très pince-sans-rire et son regard malicieux quand il guettait les réactions à ses plaisanteries. Il aimait raconter ses voyages toujours atypiques. C’était un homme d'une grande culture et passionnant. Il va vraiment nous manquer.

Jean-Marc a également joué un rôle important dans l’association française GRETSI (Groupe de REcherche en Traitement du Signal et des Images). Il a notamment été le président du colloque GRETSI 1997 à Grenoble, qui a amorcé l’itinérance de cette conférence en France, et même au-delà des nos frontières. Le GRETSI 1997 fêtait également les 30 ans du GRETSI. Et nous nous réjouissions d’avoir Jean-Marc Chassery parmi nous, à la fin du mois d’août, à l'occasion du GRETSI 2023, de retour à Grenoble.

Outre ses contributions et son rayonnement scientifiques, son investissement et ses prises de responsabilités aux niveaux local et national, nous voulons souligner l’homme de coeur, le guide, l’ami véritable qui nous quitte avec toutes ses qualités humaines : sa gentillesse, sa bienveillance, sa générosité, sans oublier sa gaieté et son humour pince-sans-rire.

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